Deux ans (tout de même) après la sortie d'Avadon : The Black Fortress, premier épisode d'une nouvelle série de RPG old school imaginée par l'excellent studio Spiderweb Software, voici que débarque la suite : The Corruption. Il est évident que le fameux Jeff Vogel se concentre sur le développement de l'histoire, sans oublier quelques rajouts de gameplay, mais ne faudrait-il pas penser à bosser un peu sur les défauts ? Autopsie d'un RPG...
À la fin d'Avadon : The Black Fortress, j'échouais lamentablement à vaincre le tout puissant patron de la forteresse noire, Redbeard. Travailler pour lui était une évidence pendant tout le premier épisode. Ce n'était que sur la fin, après avoir voyagé à travers les nombreux pays du pacte, après avoir compris les faiblesses et les abus d'Avadon, mais aussi ses mérites, que vous pouviez tenter de détrôner cet éminent personnage, afin d'instaurer, peut-être, un pouvoir plus juste. Ou freiner un peu sur la torture des prisonniers politiques, quoi. Mais cela demandait une préparation sans faille et j'ai échoué. Peut-on vraiment le battre ? Oui, c'est long (un peu ennuyeux) et difficile, mais possible.
Retour au bas de l'échelle
Quoi qu'il arrive à la fin d'Avadon, Redbeard est de toute façon toujours en poste au début d'Avadon 2, qui se déroule peu de temps après les événements du premier. C'est finalement cela le plus dommage : votre ancien personnage et même ses compagnons PNJ ne réapparaîtront pas, malgré leur important rôle dans l'introduction de l'histoire. Vous débutez en fait comme soldat du pacte, en plein trouble dans le territoire Wyldrylm. Doué d'initiative et de quicksave/quickload, vous serez repéré par Redbeard qui fera de vous un des fameux guerriers d'Avadon. Vous allez alors mettre, à la suite du doigt, un bras, une jambe et la tête (alouette) dans un engrenage où, une fois encore, vous devrez décider du sort du continent de Lynaeus.
Si vous avez manqué le début...
Le scénario progresse donc, mais assez lentement, avec un démarrage poussif. Il ne s'avère pas impératif d'avoir joué au premier Avadon, mais ça complique fortement l'implication sinon. Ça serait dommage de ne pas comprendre l'importance de la poursuite de Miranda à travers la Corruption, terre chaotique où rien ne survit, sans l'avoir connue avant. Et s'embarquer pour la première fois vers l'Empire Tawon, d'où viennent toutes les conspirations, sans en avoir entendu parler en long et en large dans le premier épisode,serait plus que regrettable. Relisez donc le test d'Avadon, procurez-vous-le, et passez à la suite quand ça sera torché !
Rien n'est parfait
J'ai cru un temps que Spiderweb allait faire trainer la série pendant des plombes et je craignais fortement de décrocher rapidement, mais Avadon 2 se réveille en milieu de route et nous propose de bons moments de bravoure. Les combats restent bourrins en mode normal, mais quelques affrontements spéciaux demandent de connecter deux neurones pour que tout se déroule correctement. Et si vous choisissez l'affrontement final avec Redbeard, une fois encore : soyez préparés. Bien préparés ! L'évolution des personnages est toujours aussi prenante. En revanche, il manque à travers le jeu des options de défense contre les attaques mentales (charme, terreur, etc.). Du coup, on est presque obligé de développer un Blademaster possédant la bonne compétence pour protéger le groupe (ce que je n'ai pas fait, ahah). Un petit trou dans le gameplay à corriger ?
Sortez entouré
L'une des principales nouveautés de cet opus est la classe du Tinkermage, sorte d'ingénieur magique qui pose des tourelles et manipule quelques gadgets sympathiques. Pas très intéressant à faible niveau, il devient très utile au bout d'un moment. Il garde tout de même un rôle de support, il est donc préférable de jouer une classe plus directe et d'embarquer en mission le compagnon adéquat (un rigolo du nom d'Alcander). Comme dans le premier jeu, chaque classe aura son représentant dans la forteresse d'Avadon, et vous partez toujours à l'aventure avec deux d'entre eux. Pas de panique, vous aurez l'occasion de jouer chacune des quêtes de compagnon et de prendre des décisions graves les concernant. Cela influencera surtout la fin du jeu, quand ils décideront de vous suivre ou non dans vos choix.
Courrez petits aventuriers !
Techniquement, on ne va pas trop se plaindre : c'est du Spiderweb, on sait à quoi s'attendre. Cela dit, je râlais la dernière fois sur les déplacements un peu lents des personnages et c'est toujours le cas. Les cartes sont grandes et on ne s'ennuie pas quand on les explore pour ne rater aucune quête annexe ou événement spécial. Mais une fois une nettoyée, on se retrouve parfois à devoir les traverser de long en large pour un objectif précis, sans danger aucun en chemin, et ça se traîne ! Le pire étant l'énorme citadelle d'Avadon qui pourrait installer un système de portail interne pour aller d'un quartier à l'autre, parce que je n'en peux plus de ses couloirs ! Aussi, la résolution augmente, mais si on pouvait enfin passer du 4:3 au 16:9, ça serait tout de même pas mal.
Loin du manichéisme
Jeff Vogel écrivait récemment qu'il ne supportait plus les plot twists et les retournements de situation dans les scénarios de jeux vidéo. Et clairement, avec Avadon, il construit petit à petit une histoire qui s'intensifie et se dramatise sans qu'on ne puisse imaginer d'échappatoire deus-ex-machinien. Il y aura des conséquences, et tant mieux, mais la vraie fin est pour plus tard. Avadon 2 est riche en informations et en développements, mais ne résout pas grand-chose il est vrai. De plus, on retrouve la construction très prévisible (on a eu droit à la même dans The Black Fortress) de la narration. Mais le rapport aux différents personnages importants est sans équivalent. Spiderweb arrive même à placer une romance possible bien plus complexe que celle imaginée par Bioware. Du coup, j'attends avec impatience le troisième épisode, mais j'espère aussi que Spiderweb saura ne pas étirer et faire traîner en longueur cette intense saga.
Si le style d'Avadon ne vous rebute pas complètement, sachez que les mécanismes RPG cachés par les graphismes en 2D restent très solides (avec quelques avatars d'Avernum ou Geneforge qui ne servent plus trop à grand-chose, mais qui ne gênent pas non plus). Prenez votre temps, essorez le jeu, réfléchissez bien au monde de Lynaeus et à ce que vous devez faire... N'espérez pas de happy end ni de pirouette scénaristique pour vous sortir des situations complexes. Une bonne soixantaine d'heures de combats acharnés (jouez en difficile tout de même) et de décisions cornéliennes vous attendent. Bonne chance.
Avadon 2 : The Corruption coûte 9 euros sur Steam ou GoG, 20 dollars en direct sur le site officiel si vous voulez filer plus de blé à Spiderweb (mérité). Il sera dispo début 2014 sur iPad.